Régularisation du Timbre fiscal en appel
Au terme de l'article 1635 bis P du Code Général des Impôts ( modifié par la loi n°2016-1918 du 29 décembre 2016), a été institué un droit d'un montant de 225,00 € dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel. Ce droit est acquitté par l'avocat postulant pour le compte de son client par voie électronique. Il n'est toutefois pas dû par la partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.
Enfin, ce droit sera perçu jusqu'au 31 décembre 2026, sauf nouvelle prorogation.
La sanction du défaut du règlement de ce droit est fixée à l'article 963 du code de procédure civile ainsi : irrecevabilité de l'appel ou des défenses, selon le cas. Le sort de l'appelant n'est donc pas celui de l'intimé qui, lui, voit se poursuivre le procès, sans que ne puissent être cependant examinées par la Cour ses conclusions d'appel en réplique ou ses pièces et donc qu'un appel incident éventuel ou une autre demande reconventionnelle ne puisse éventuellement prospérer.
Le texte a institué là une fin de non-recevoir, s'agissant d'une irrecevabilité. Mais la Cour de cassation lui fait suivre un sort particulier, puisqu'elle déroge aux dispositions de l'article 126 du code de procédure civile incluses dans le chapitre du code de procédure civile propres aux fins de non-recevoir, qui prévoient ordinairement une possibilité de régularisation des fins de non-recevoir jusqu'à ce que le juge statue.
A lire la lettre de l'article 126, l'auteur de ces lignes imaginait que l'irrecevabilité prononcée sur le fondement de l'article 963 était temporaire et pouvait donner lieu à une régularisation par la partie visée. Or tel ne semble pas être le cas.
En effet, selon aux arrêt du 16 mai 2019 (pourvoi n°18-13434), la seconde chambre civile a rejeté un pourvoi formé contre une Cour d'Appel ayant déclaré un appel irrecevable pour défaut de règlement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts, alors que le paiement du droit avait été effectué avant que la Cour ne statue, tandis qu'elle était saisie sur un déféré formé contre la décision du conseiller de la mise en état déclarant l'appel irrecevable sur le motif précité.
Implicitement, la Cour de cassation exige que la régularisation du paiement de la taxe intervienne avant le prononcé de la première décision d'irrecevabilité par le Conseiller de la mise en état ou le Président de la chambre concernée, mais pas postérieurement, peu important qu'un recours ait été formé par la partie sanctionnée et non encore tranché.
Cette décision est tout à fait curieuse, puisque la Cour de cassation a refusé ostensiblement de faire application du texte de l'article 126 précité, qui était pourtant cité par la demanderesse à la cassation dans son mémoire et s'imposait à elle. La Cour de cassation n'entend elle pas le déféré comme un véritable recours ?
Il y a là encore la manifestation d'une volonté de contraindre les parties - et l'appelant plus que les autres - à s'acquitter avec célérité du droit prévu dès la demande présentée à cette fin par le Greffe.
Cette appréciation ne va cependant pas sans poser une difficulté au regard de la différence de traitement entre l'appelant et l'intimé et donc au regard de l'article 6§1 de la CESDH. De plus, la taxe ayant été réglée en l'espèce dans les deux mois de la demande du Greffe, n'y a-t-il pas là une sanction exagérée au regard du but poursuivi et donc encore une violation de l'article 6§1 de la CESDH?
Enfin, l'utilité de cette position jurisprudentielle est critiquable tandis que les dispositions de l'article 1635 bis P du CGI tendent à affecter le produit du droit acquitté - normalement - au fonds d'indemnisation de la profession d'avoués près les cours d'appel. Il s'agit de collecter une taxe et de pousser les plaideurs à l'acquitter, donc en usant de la sanction prévue avec parcimonie et discernement.